Le développement rapide des technologies de l’information et de la communication a vu naître de nouveaux instruments contractuels, à l’image des contrats intelligents. Ces derniers suscitent un intérêt grandissant tant pour les professionnels que les chercheurs en droit. Cet article propose d’examiner les enjeux liés à la reconnaissance juridique des contrats intelligents, ainsi que les perspectives d’évolution en la matière.
Qu’est-ce qu’un contrat intelligent ?
Un contrat intelligent, ou « smart contract » en anglais, est un protocole informatique qui permet d’exécuter automatiquement les clauses d’un contrat lorsqu’une certaine condition est remplie. Les contrats intelligents sont généralement basés sur la technologie blockchain, qui garantit leur transparence, sécurité et traçabilité. Cette technologie permet également de réduire le recours aux intermédiaires tels que les avocats ou les notaires, ce qui peut s’avérer économiquement avantageux.
Reconnaissance juridique des contrats intelligents
La question de la reconnaissance juridique des contrats intelligents pose plusieurs défis pour le législateur. En effet, ces contrats peuvent être perçus comme une menace pour l’autorité des tribunaux et la sécurité juridique, dans la mesure où ils ont vocation à se substituer aux contrats traditionnels rédigés par des professionnels du droit.
Plusieurs pays ont déjà légiféré sur la question des contrats intelligents. Par exemple, aux États-Unis, l’État du Delaware a adopté en 2016 une loi qui reconnaît la validité des contrats intelligents et leur accorde une valeur juridique. De même, le Royaume-Uni a adopté en 2019 une disposition législative qui prévoit que les contrats intelligents sont juridiquement contraignants.
En France, le législateur a également commencé à s’intéresser à cette question. La loi PACTE de 2019 a ainsi introduit la notion de « dispositif d’enregistrement électronique partagé », qui englobe notamment la technologie blockchain et permet d’envisager une reconnaissance juridique des contrats intelligents. Toutefois, cette reconnaissance reste encore partielle et limitée.
Enjeux et perspectives d’évolution
La reconnaissance juridique des contrats intelligents soulève plusieurs enjeux majeurs pour le droit et la justice. Parmi ceux-ci figurent notamment :
- L’interopérabilité des systèmes juridiques : avec l’émergence des contrats intelligents, il devient nécessaire de repenser les règles applicables aux contrats internationaux et d’harmoniser les législations nationales pour faciliter leur mise en œuvre.
- La protection des droits fondamentaux : les contrats intelligents étant basés sur des algorithmes informatiques, leur exécution automatique peut poser des problèmes en termes de respect des droits de la personne, tels que le droit à la vie privée ou le droit au recours en justice.
- La responsabilité juridique : l’exécution automatique des contrats intelligents soulève également des questions relatives à la responsabilité des parties en cas de litige. Il convient ainsi de déterminer qui peut être tenu responsable en cas de défaillance du contrat (les concepteurs, les utilisateurs, etc.).
Ces enjeux appellent à une évolution du cadre juridique applicable aux contrats intelligents. Plusieurs pistes peuvent être envisagées, comme la création d’un statut spécifique pour ces contrats ou l’adaptation des règles existantes en matière de preuve et de responsabilité.
En définitive, la reconnaissance juridique des contrats intelligents représente un défi majeur pour les systèmes juridiques contemporains. Les législateurs doivent ainsi s’adapter aux évolutions technologiques et repenser les règles applicables à ces instruments contractuels innovants, afin d’assurer leur conformité avec les principes fondamentaux du droit et de garantir la sécurité juridique pour l’ensemble des parties concernées.